Extraits de la conférence de Heba Zaphirou-Zarifi : Pas de deux ou la danse de l’individuation. Le compte rendu de la conférence est publié sur le site du groupe Jung (mp3 disponible à cette même adresse).
« La féminité consciente est la conscience de la matière. Le corps est le vaisseau de la féminité consciente, le berceau où nait la sagesse, au lieu d’être maltraité, haï ou négligé. Quand nous devenons plus conscients de notre corps, nous acceptons le lieu où nous sommes dans notre traversée personnelle. Présence et processus, Réceptivité et Laisser Advenir, Résonance, Capacité Relationnelle, Valeur du Sentiment et Existence Authentique. Dans le corps c’est expérimenté comme l’énergie de la Kundalini, comme la lumière se déplaçant dans le corps, à son rythme lent naturel. La féminité, énergie yin, est représentée dans les rêves par des figures féminines, ou des images de contenant, le sac à main, l’utérus, la biologie féminine.
Acquérir l’attitude de la vierge, cela signifie accepter sa vie humaine et s’ouvrir à sa propre vérité, être fidèle à son essence, que l’on soit homme ou femme. Aussi longtemps que la vierge est inconsciente, ne peut accepter et pardonner ses propres imperfections et celles des autres, elle ne peut s’ouvrir à la lumière et se livrer à l’énergie du Soi. Quand le moi trouve son expression dans le féminin différencié: « voici qui je suis, ni plus, ni moins » sans besoin de justification ou d’approbation, il est libéré de la loi de l’animus négatif et du complexe du père négatif. Chez les hommes, pour que la vierge prenne naissance, il faudra l’extirper de l’anima négative et du complexe de la mère négative.
Le féminin conscient est alors prêt à être fécondé par un père inconnu, donnant naissance à une nouvelle conscience. La vierge est toujours enceinte, enceinte de toutes les possibilités de l’être, enceinte de son âme. Le nouveau masculin, né de la vierge, protègera, défendra, chérira le féminin, il soutiendra la valeur de sentiment que le féminin conscient a trouvé dans les profondeurs du corps et permettra à l’énergie de se développer suffisamment pour la faire naitre au monde. Nous voyons aujourd’hui, dans la tourmente qui touche les vieilles structures du monde, la naissance douloureuse d’une nouvelle conscience, dont les artistes, les poètes, les écrivains, les architectes sont les nouveaux chamanes, essayant d’articuler les nouveaux symboles de guérison qui nous guideront vers le futur.
La masculinité consciente, le second partenaire de la danse, est très différente du principe de pouvoir qui régit les systèmes patriarcaux. Le patriarcat est orienté vers un but, unilatéral, intéressé seulement au produit, non au chemin et ravageant la terre et le corps par la volonté de puissance et l’avidité. Il obéit aveuglément aux ordres, qu’ils servent la vie ou la mort, il est orienté vers le perfectionnisme, la perfection négatrice de vie. En contraste, le masculin créatif respectera les lois de la nature, amenant le discernement, l’épée de la discrimination, la clarté de pensée et la prise de décision, se basant sur la valeur individuée plutôt que sur les valeurs collectives.
Ces deux énergies de la danse se séparent, se retrouvent, se séparent à nouveau comme les serpents jumeaux dansant le long du Caducée, s’équilibrant l’un l’autre, mais aussi élevant l’un l’autre à un niveau encore plus élevé et plus profond de conscience, qui est le tiers né des deux et qui n’est aucun des deux. « Viens, danse avec moi, viens danser. »
Le partenariat atteint par Margot Fonteyn et Rudolph Nureyev, durant les vingt ans de leur performance commune, peut être vu comme une parfaite illustration de ce processus. Elle, danseuse reconnue de 40 ans, proche de la retraite, musicienne lyrique, et lui alors jeune danseur timide de 20 ans, avec une ferveur, une vigueur, une prouesse physique indéniable, animal brulant de feu et d’énergie physique pure. Dans cet échange, elle devint moins restreinte, plus passionnée, complètement brillante, lui devint une star, un modèle de danseur livrant sa masculinité dans la danse, ne se contentant pas d’être un gentleman portant la ballerine. L’archétype œuvrait à travers son moi abandonné, fort et flexible. L’intensité de leur danse était incandescente, leur valant quarante minutes d’applaudissement du public au comble de la fièvre. »
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Superbe…!
Je crois en effet que la féminité consciente, c’est bien …mais qu’elle n’est rien s’il n’ y a pas, pour l’équilibrer et pour « danser » avec elle, une masculinité consciente et évoluée, ayant lâché les excès du masculin « patriarcal ».
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Oui, c’est là toute la valeur du travail de Marion Woodman.
Je suis en train de traduire un texte où elle parle de son travail avec Robert Bly.