Extrait du livre de Francine Perrot, Le Langage imagé des rêves, dialoguer avec notre double secret
LE MONDE DES RÊVES
Il nous arrive de rêver éveillés et de nous inventer des histoires. Il peut être instructif de suivre ces rêveries et de voir où elles nous mènent. Les enfants, demeurés proches de l’inconscient, vivent spontanément ces mondes fantasmatiques auxquels ils donnent corps dans leurs jeux, leurs dessins et leurs aventures imaginaires souvent incomprises des adultes murés dans l’étroitesse de leur rationalité. Le jeu et l’imagination sont indispensables à la construction et au développement mental de l’enfant et nous devons nous garder de rationaliser leurs productions, car ils expriment et représentent, non le monde concret, mais leur monde intérieur. Quant aux musiciens, aux romanciers, aux poètes, aux cinéastes et à tous les artistes qui ont la chance d’avoir gardé de leur enfance un lien privilégié et spontané avec l’irrationnel et ses inspirations, avec leur double intime, ne donnent-ils pas forme dans leurs œuvres, par leur labeur et leur art, leur « métier », à leurs rêves, leurs phantasmes et leurs sentiments profonds ? Toute oeuvre artistique ou littéraire n’est-elle pas la réalisation, la concrétisation d’un rêve, le fruit d’une rencontre avec notre être intérieur ?Les peuples de l’Antiquité attachaient beaucoup d’importance aux rêves qui faisaient partie des initiations et aussi des thérapies car ils savaient que la santé du corps et celle de l’âme vont de pair. Ainsi, à Épidaure, les malades se préparaient à recevoir des songes envoyés par Esculape, le médecin mythique porté au rang des dieux, par des jeûnes, des prières et des rites, avant de passer une nuit « d’incubation » dans son temple. Des serpents y vivaient en liberté. Le serpent représente notre moelle épinière et notre vie instinctive nécessaires à la préservation de notre santé. C’est pourquoi des serpents s’enroulent autour du caducée qui continue à symboliser, depuis ces temps lointains, la profession médicale. Ils sont deux, car la santé, tant morale que physique, est un équilibre entre les énergies complémentaires. Le caducée était également un attribut de Mercure au casque et aux talons munis d’ailes, esprit mobile et insaisissable comme le métal dont il porte le nom et comme les inspirations et les rêves qui ont tendance à nous échapper si nous ne réussissons pas à les saisir sur le vif. Il faisait le lien entre « le domaine des dieux » et le monde des humains, entre l’inconscient et le conscient, il participait des deux, c’est pourquoi il était hermaphrodite. Au matin, les prêtres-médecins du temple interprétaient les rêves du patient, et c’est d’après les indications qu’ils en tiraient qu’ils lui prescrivaient les remèdes appropriés et des conseils de vie saine. En alchimie, le Soufre, masculin, est à la fois opposé et relié à Mercure, qui était représenté comme androgyne.Tous les peuples de cultures dites traditionnelles, non industrielles qui ont conservé un lien avec leur vie spontanée vénèrent les « grands rêves », tant pour le rêveur que pour la communauté et les racontent solennellement à la tribu réunie. Si ces rêves sont ressentis comme ayant un contenu religieux, ils peuvent donner lieu à la création de rites et de cérémonies, de chants et de danses. De même, les contes populaires et les mythes sont le fruit de l’imagination créatrice des différents peuples, les réponses symboliques à leurs questionnements sur la naissance du monde, les grandes énigmes de la vie et leurs aspirations profondes. Ils sont l’expression d’une sagesse millénaire, ces «vérités éternelles» qu’il nous faut traduire dans un langage de notre époque. Et les religions n’ont-elles pas, à l’origine, été « révélées » par des songes et des visions ? Ainsi, on voit parfois aux chapiteaux de nos cathédrales un ange, messager divin, penché sur l’épaule de l’évangéliste pour lui dicter son texte.
Il nous arrive de rêver éveillés et de nous inventer des histoires. Il peut être instructif de suivre ces rêveries et de voir où elles nous mènent. Les enfants, demeurés proches de l’inconscient, vivent spontanément ces mondes fantasmatiques auxquels ils donnent corps dans leurs jeux, leurs dessins et leurs aventures imaginaires souvent incomprises des adultes murés dans l’étroitesse de leur rationalité. Le jeu et l’imagination sont indispensables à la construction et au développement mental de l’enfant et nous devons nous garder de rationaliser leurs productions, car ils expriment et représentent, non le monde concret, mais leur monde intérieur. Quant aux musiciens, aux romanciers, aux poètes, aux cinéastes et à tous les artistes qui ont la chance d’avoir gardé de leur enfance un lien privilégié et spontané avec l’irrationnel et ses inspirations, avec leur double intime, ne donnent-ils pas forme dans leurs œuvres, par leur labeur et leur art, leur « métier », à leurs rêves, leurs phantasmes et leurs sentiments profonds ? Toute oeuvre artistique ou littéraire n’est-elle pas la réalisation, la concrétisation d’un rêve, le fruit d’une rencontre avec notre être intérieur ?Les peuples de l’Antiquité attachaient beaucoup d’importance aux rêves qui faisaient partie des initiations et aussi des thérapies car ils savaient que la santé du corps et celle de l’âme vont de pair. Ainsi, à Épidaure, les malades se préparaient à recevoir des songes envoyés par Esculape, le médecin mythique porté au rang des dieux, par des jeûnes, des prières et des rites, avant de passer une nuit « d’incubation » dans son temple. Des serpents y vivaient en liberté. Le serpent représente notre moelle épinière et notre vie instinctive nécessaires à la préservation de notre santé. C’est pourquoi des serpents s’enroulent autour du caducée qui continue à symboliser, depuis ces temps lointains, la profession médicale. Ils sont deux, car la santé, tant morale que physique, est un équilibre entre les énergies complémentaires. Le caducée était également un attribut de Mercure au casque et aux talons munis d’ailes, esprit mobile et insaisissable comme le métal dont il porte le nom et comme les inspirations et les rêves qui ont tendance à nous échapper si nous ne réussissons pas à les saisir sur le vif. Il faisait le lien entre « le domaine des dieux » et le monde des humains, entre l’inconscient et le conscient, il participait des deux, c’est pourquoi il était hermaphrodite. Au matin, les prêtres-médecins du temple interprétaient les rêves du patient, et c’est d’après les indications qu’ils en tiraient qu’ils lui prescrivaient les remèdes appropriés et des conseils de vie saine. En alchimie, le Soufre, masculin, est à la fois opposé et relié à Mercure, qui était représenté comme androgyne.Tous les peuples de cultures dites traditionnelles, non industrielles qui ont conservé un lien avec leur vie spontanée vénèrent les « grands rêves », tant pour le rêveur que pour la communauté et les racontent solennellement à la tribu réunie. Si ces rêves sont ressentis comme ayant un contenu religieux, ils peuvent donner lieu à la création de rites et de cérémonies, de chants et de danses. De même, les contes populaires et les mythes sont le fruit de l’imagination créatrice des différents peuples, les réponses symboliques à leurs questionnements sur la naissance du monde, les grandes énigmes de la vie et leurs aspirations profondes. Ils sont l’expression d’une sagesse millénaire, ces «vérités éternelles» qu’il nous faut traduire dans un langage de notre époque. Et les religions n’ont-elles pas, à l’origine, été « révélées » par des songes et des visions ? Ainsi, on voit parfois aux chapiteaux de nos cathédrales un ange, messager divin, penché sur l’épaule de l’évangéliste pour lui dicter son texte.
— Francine Perrot, Le Langage imagé des rêves : dialoguer avec notre double secret, « Fugue »
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J’aime beaucoup l’expression « dialoguer avec notre double secret »…:-)