L’apprivoisement du feu

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Artist: Ronnie Biccard

Face au ton qui monte dans les discussions  ou les médias, devant certains fils d’actualité et commentaires où se mêlent jugements, accusations, condamnations, etc. (le tout assorti de noms d’oiseaux), je me sens infiniment triste…
La forme ne reflète  malheureusement pas ce qui cherche réellement à se dire, et les gouttes d'huile pleuvent sur un brasier qui ne cesse de s'étendre.
Nul, il est vrai, ne nous a appris le langage qui relie.
Quand les esprits s’échauffent dans notre monde en flamme, quand un simple mot, une seule  image peut entraîner un nouvel embrasement, je me sens impuissante, profondément désolée et inquiète.
Et quand ce qui, de loin, ressemblait au murmure du vent, s’avère finalement être un bruit de bottes qui se rapproche, j’ai peur.
Je vois le fossé se creuser de façon dramatique entre les états, les régions, les partis politiques, les religions, les générations. L’épidémie de violence se répand dans le monde, s’immisce dans nos foyers… et jusque dans nos cœurs. Mon cœur se brise quand je vois l’escalade verbale au sein de plus en plus de familles — et malheureusement aussi les punitions, les menaces… parfois les coups.
Le seul remède que je vois, c’est d’accueillir cette violence en nous-mêmes et de porter attention à ce qui la réveille et la sous-tend.

Je ne suis pas seule à craindre pour ce monde ni à rêver d’harmonie, de paix et d’échanges pacifiés.

Aussi l’espoir m’habite-t-il quand je vois s’activer le petit groupe d’ambassadeurs de la paix, le nombre chaque jour grandissant de ces pompiers d’un genre nouveau, capables d’apprivoiser les flammes intérieures et d’alimenter les échanges d’un bois qui réchauffe ou éclaire.
Je me réjouis aussi quand je vois rouler, sur les joues de quelques soldats du feu qui font usage de la force dans le but de protéger, des larmes qui éviteront que l’incendie se propage.
Leurs larmes témoignent de la violence du monde et de son impact, et aussi de ce qu’ils parviennent à incarner malgré tout :

Un minimum de force,
Un maximum d’amour.

La déception, la tristesse, l’impatience — le découragement parfois — font régulièrement surface quand on s’emploie à cultiver la réceptivité, la bienveillance, l’attention, le soin… et que les vieilles habitudes se frayent un chemin à notre insu.
Mais l’intention, mes amis, l’intention seule compte.
Tandis que l’on se désole du manque d’aptitude, du manque de savoir-faire ou de savoir-être, l’engagement, lui, reste intact.
C’est le moment où faire preuve de bienveillance envers soi est essentiel, où rejoindre une communauté et partager avec des amis pompiers est crucial. C’est auprès d’eux que l’on se rappelle et se réjouit des essais qu’on a pu transformer. C’est ainsi que l’énergie revient, c’est ainsi que l’on se souvient de son engagement et qu’on retrouve la véritable flamme qui l’alimente.

Un peu curieux au départ, l'on s'approche timidement de cette étrange communauté, puis l'on prend part à la ronde pour finalement choisir de demeurer dans le cercle.
C’est la magie de la communauté : elle nous permet d’apprendre les uns des autres, de nous soutenir les uns les autres. Elle témoigne d’un autre type de foyers dans lesquels notre attention est tournée vers les aspirations véritables, celles qui sous-tendent parfois les discours incendiaires et maladroits, et qui vient nourrir les liens, solliciter et augmenter notre capacité d’aimer.

— © Michèle Le Clech
(relecture : Nelly Delambily)

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