Mots et destins croisés

Carnets de rêvesHumeur du jour 1 Comment

dictionnaireJ’étais un mot dans un dictionnaire. Familial.
Et, il y a longtemps de cela, quelqu’un en a écrit la définition.
Peut être ma mère, mon père, mon grand-père ou ma grand-mère…
Quelqu’un, donc, a écrit mon prénom — comme d’autres ont peut-être écrit le vôtre, ou un Etat votre genre ou la couleur de votre peau, et vous ont définis, il y a des lustres…

La plupart du temps, cette définition tient compte des besoins de ceux qui rédigent. Vous devenez ainsi « la petite fille toujours sage », « la gamine qui désamorce les bombes d’émotion qui menacent d’éclater », « celle qui veille sur les plus jeunes », « le garçon qu’ils auraient aimé avoir »… « une minorité ethnique », « une personne de couleur », « un réfugié »…
On pourrait écrire des pages.

Je suis devenue « celle qui avait les réponses » — pour qui ne prenait pas la peine de les chercher. Mots croisés ou questions existentielles même combat.
Mais, il ne nous appartient pas d’apporter ou d’incarner la réponse que la génération précédente n’a pas su, pu ou voulu trouver. Quel que soit notre implication et les terribles sacrifices que nous consentons, ce ne sera jamais suffisant. Le problème n’est tout simplement pas le nôtre.

Je suis tombée un jour sur une page du dictionnaire et j’y ai trouvé mon nom.
La page m’est restée dans les mains.
L’auteur de la définition s’est empressé de demander :
— « Comment vais-je faire si tu t’en vas ? »
Je n’avais pas la réponse.
Ce n’était, après tout, qu’une définition.
Les enfants n’appartiennent pas à leurs parents. Ils appartiennent à la terre, ils appartiennent à la vie.
Un lien s’est en partie rompu.
Cette idée, un instant, m’a parue terrifiante.
— Qui suis-je si je ne suis plus « ça » ?
Rien.

Qui suis-je si je ne suis plus « ça » ?
Qui-suis-je ?

Je suis finalement qui je suis.
Et je suis à facettes.
Comme un diamant.
A effet domino.
Une lourde responsabilité glisse de mes épaules.
Je respire, allégée.
D’où me vient cette soudaine énergie ? d’où me vient cette liberté d’être et de faire, de dire, de penser et d’aimer, de danser, de chanter ?
C’est la vie qui coule à travers moi.
Ma vie.

Comments 1

  1. Bonjour, Porter sa voix dans ce nuage impalpable,une voie bien aride mais que l’image du semeur avec son geste régulier, confiant, soutienne les mots. Semons.
    Cordialement Ale

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