Amour impossible ?

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Tomber follement amoureux, se sentir rempli(e) d’une incroyable énergie et d’un bonheur sans limite…
C’est fabuleux.
Ça l’est moins cependant lorsqu’on sait — ou qu’on  le découvre par la suite — qu’il s’agit là d’un amour impossible…
C’est quelque chose que beaucoup d’entre nous ont vécu.
Comme souvent dans ces situations,  une part de nous tend irrésistiblement vers l’être aimé tandis qu’une autre s’en défend ; et dans ce monde où les opposés sont tenus séparés, il ne peut exister dans le même temps une chose et son contraire. C’est donc le déchirement, la lutte entre le cœur et la raison : comment être amoureux de celui ou celle que l’on attendait depuis toujours et accepter que cela ne puisse être vécu ? Inondé d’amour, le cœur voit la raison brandir l’épée du pouvoir et de sa loi, et finit par se rendre, vaincu.
C’est pour un temps le règne de la raison…  jusqu’à ce que ses fondements soient ébranlés par le cœur qui se meurt. Une spirale infernale commence et l’on oscille entre les contraires.
Il se peut alors que l’on s’en veuille d’avoir créé, ou de n’avoir pas évité, les circonstances qui nous ont fait (re)tomber dans le piège des amours impossibles, des complications et de l’infinie souffrance qu’ils génèrent. Peut-être s’était-on promis de ne plus succomber à la passion et à l’ivresse.
Peine perdue, il suffit d’une circonstance particulière, on se croyait fort… et crac, on est pris.
Vivre sans l’autre paraît impossible, vivre cet amour l’est tout autant.

Mais un coup de foudre n’est pas forcément la naissance d’un amour comme on l’entend habituellement, et celui ou celle qui accepte de se tourner vers ses rêves sera tout étonné.e de voir comment l’inconscient présente cet événement. Il peut en effet s’agir d’un trauma non résolu qui se rejoue à travers cette histoire — du trauma et du sacrifice de nombreuses parts de soi qui en résulte souvent. Les rêves présentent alors ces morceaux d’âme afin que nous puissions les délivrer du sort qui pèse sur eux, et leur faire une place dans notre vie.
L’émoi qui nous saisit face à l’être aimé peut aussi s’adresser à une partie de nous jusqu’alors ignorée ou inconnue. Il peut s’agir par exemple de nos valeurs les plus profondes ou d’entreprises que nous nous interdisons ou remettons sans cesse à plus tard ; c’est la raison pour laquelle nous ne pouvons concevoir de renoncer à cet amour.
Ces valeurs, ces qualités, nous les « jetons » (projetons) en quelque sorte sur un partenaire qui, s’il n’y prend garde, peut endosser le vêtement qui nous irait si bien. Et, sans en être aucunement conscients, nous attendons de ce partenaire qu’il se comporte comme nous le souhaiterions.

Dans ces moments de terrible souffrance et de grande confusion, les rêves nous réinventent. Ils nous apparaissent de prime abord incompréhensibles, mais une seconde lecture nous montre qu’ils illustrent pourtant savamment la situation.
Tout en démêlant les choses, ils tissent, au fil des nuits, un vêtement nouveau, sur mesure, qui n’appartient qu’à nous : si les histoires d’amours impossibles sont légion, notre situation est unique, et les images des rêves le sont tout autant.
En les faisant siennes, le rêveur peut (par exemple) accéder à d’autres niveaux de conscience, ou voir des possibilités nouvelles se dessiner.
Illustrons cela (naturellement, ce qui suit ne vaut que pour la rêveuse ; chaque rêve est unique) :
Lors d’un déplacement professionnel, une femme se retrouve complètement sous le charme de l’un de ses collègues puis nourrit, des mois durant, le fantasme d’une union avec lui.
La vie lui pèse et, chez elle, la situation avec son partenaire se dégrade.
Dans l’un de ses rêves, l’image d’un enfant de six mois apparaît, un enfant sur lequel elle doit veiller (la rencontre remonte à six mois).
La rêveuse réalise alors que quelque chose en elle a en quelque sorte « épousé » cet homme, que l’union qu’elle espère tant à l’extérieur a bien eu lieu et que, de ce mariage — tout intérieur —, quelque chose est né.
En observant le rêve de plus près, elle réalise que l’enfant s’apparente à une femme en lien avec des compétences professionnelles chèrement acquises au fil des années.
Elle constate également que l’endroit où vit cet enfant n’est pas anodin puisqu’il symbolise à ses yeux ce qu’un ami proche a patiemment reconstruit après avoir quitté un milieu professionnel qui ne correspondait pas à ses valeurs.
L’homme aimé incarnait ainsi pour la rêveuse le métier « de ses rêves » et, en épousant l’idée qu’elle pourrait bien faire « un » avec ce métier, elle a donné naissance à un nouveau projet de vie, fruit de ses compétences et de ses aspirations.
Et c’est sur cela qu’elle doit veiller ; il y a en elle, comme chez son ami, courage et détermination pour incarner ses valeurs de vie.
C’est ainsi que, lorsque l’on adhère à ce qui émerge de la profondeur nous sommes, un peu plus consciemment, de l’étoffe dont sont faits nos rêves.

Ces amours impossibles nous offrent aussi une leçon de vie, une leçon d’amour que Christiane Singer résume avec force et simplicité en ces mots :

Ne confondons pas les êtres aimés avec l’amour.
Nous sommes, les uns et les autres qui nous aimons, des fenêtres à ouvrir.
Dans la tradition zen on dit : Ne confonds pas le doigt qui montre la lune et la lune. L’amant et l’amante ne peuvent jamais être davantage que le doigt qui montre la lune.
Le pire qui puisse nous arriver c’est quand l’être aimé détourne l’amour à son profit. C’est alors le drame. C’est-à-dire quand l’être aimé se confond avec l’amour que vous lui portez, sans voir que cet amour n’est qu’invitation au dépassement.
J’apprends, dans l’amour que je porte à un être, que l’amour, et le sens de l’amour, est d’apprendre à aimer, rien d’autre.

© Michèle Le Clech
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(1) — Christiane Singer, Du bon usage des crises, Éditions Albin Michel

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  1. Merci, que c’est bien dit. « Les rêves nous réinventent… nous tissent un vêtement nouveau. » Oui ! Oserai-je ajouter qu’il n’y a pas d’amour impossible finalement car il ne nous est jamais impossible d’aimer. L’impossibilité de concrétiser cet amour renvoie en reflet à l’importance de son vécu intérieur, de tout ce qu’il nourrit, réveille et vivifie en dedans. Alors, dans la conscience que cet amour est une projection sur l’autre, il reste toujours une histoire d’amour intérieure à vivre !

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